Au Niger, à chaque rentrée scolaire, les  établissements privés sont mis en concurrence les uns avec les autres dans un véritable marché scolaire. A Niamey, où il y a un vaste choix d’écoles privées subventionnées et non subventionnées pour toutes les bourses, les parents ont de plus en plus ce que d’aucuns appellent un comportement consumériste. Sur quelle base, les parents choisissent-ils l’école de leurs enfants ? Quels ont les critères dont ils tiennent compte réellement ? Comment évaluent-ils les établissements scolaires privés ?

En ce qui concerne les parents intellectuels, les différents critères peuvent être les suivants : réputation, résultats aux examens, frais de scolarité, laïcité, infrastructures physiques, présence d’ordinateurs et ou de bibliothèques, etc. Quant aux parents illettrés, ils regardent surtout les frais de scolarité, la souplesse de paiement et la distance de l’école par rapport au lieu d’habitation.

La majorité des parents intellectuels basent leur choix sur des résultats aux examens nationaux sans tenir compte des taux d’exclusion ou de redoublement. Une école est dite excellente quand elle ne recrute que les meilleurs élèves en amont, se débarrasse des faibles en cours de route et qui, en aval, amène à bon port les éléments qui, vu leur niveau initial, auraient de toutes les façons réussi dans n’importe quel autre établissement scolaire !

Privilégier uniquement les taux de réussite aux examens aboutit à un classement dans lequel les écoles accueillant plutôt des élèves aisés et d’un bon niveau scolaire se partageront toujours et immuablement les premières places.

Mais pouvons-nous vraiment qualifier d’ « excellentes » les écoles qui se débarrassent de leurs élèves faibles et ne gardent que les forts ? Dans ces écoles, certains élèves scolarisés jugés moins bons que leurs pairs sont inscrits aux examens en candidats libres afin de ne pas faire baisser les statistiques de réussite et maintenir leur image de marque.

Pourtant, tout un ensemble d’autres critères jouent un rôle essentiel dans l’évaluation d’un établissement scolaire. Le projet pédagogique, la qualité de l’enseignement dispensé, la formation des professeurs, la participation des élèves à la vie de l’école, l’ambiance et la culture de l’établissement, tout cela doit être pris en compte. L’important ce n’est pas l’enveloppe extérieure de l’établissement, mais le contenu de cette enveloppe. Rares sont les parents, intellectuels ou pas, qui dans leur choix tiennent compte de ces facteurs alors que finalement c’est cela qui jouera sur l’éducation de leurs enfants.

Que penser par exemple d’un collège qui accueille un public issu de milieux modestes, qui ne résume pas un élève à ses notes et à son bulletin scolaire, qui valorise autant l’excellence académique que les qualités humaines de ses élèves, qui veille à l’égalité des genres, qui n’élimine pas ses éléments faibles, qui fait tout pour tirer tous ses élèves jusqu’au BEPC et qui pourtant n’affiche pas des scores brillants aux examens nationaux ? S’agit-il là d’un bon ou mauvais collège ?